Dalila ARPIN est Membre de l’École de la Cause freudienne, de l’Association Mondiale de Psychanalyse, AME (Analyste membre de l’École) et AE en exercice : ce titre d’Analyste de l’École est délivré pour trois ans à ceux qui, au terme de la procédure dite de la passe, sont jugés susceptibles, par la Commission responsable, de témoigner des problèmes cruciaux de la psychanalyse.
Suite au décès de sa grand-mère, Vincent s’adresse à une psychanalyste. Sa crainte ? Finir sa vie, ruiné, comme elle. La grand-mère est morte dans la déchéance, après 30 ans de réclusion, chez elle. Des tas de déchets s’accumulaient dans sa demeure, qui était devenue un vrai dépotoir. Cette dame avait fait fortune dans une forme d’artisanat qui avait beaucoup rapporté. Elle était la propriétaire de trois magasins qui vendaient sa production. Mais une mauvaise gestion avait eu raison de sa fortune et elle s’est retrouvée en prison, par soupçon d’escroquerie.
Le chemin de l’analyse permet à ce jeune homme de se donner un tout autre objectif : passer de la « destruction » à la « construction » et dans ce sillon, tracer un avenir différent de celui de la grand-mère mais aussi de son père, qui a fait faillite, s’endettant à vie et vivant dans la précarité.
Au moment où il est question de nettoyer la maison de la grand-mère pour la vendre, notre analysant comprend que c’est à lui de bâtir autre chose dans la famille, au lieu d’accepter passivement cet héritage.
Adolescent, Vincent avait connu une période d’errance, de dépendance aux drogues et aux jeux vidéo. Il sait transformer cette addiction en métier et devient informaticien. Mais quelque chose reste encore à faire, d’où son adresse à la psychanalyse. Ses emplois successifs lui laissent un goût d’amertume. Il est toujours malmené par ses supérieurs, qui ne reconnaissent pas son travail, tout comme son père.
Dans un premier temps, Vincent trouve la reconnaissance dans l’écriture d’une nouvelle, qui est publiée dans une revue spécialisée. Ensuite, il se saisit de deux signifiants : « artiste », qui représente le travail de la grand-mère, et « indépendant », qui vient nommer son désir. Il quitte alors son travail comme salarié et monte sa propre entreprise, destinée au commerce de l’art.
Un rêve vient nommer ce dont il s’agit, en réalité : il rêve qu’il achète un tableau mais quand il arrive chez lui, il ne lui plait plus. Il essaie de le rendre, mais la galerie ne le reprend pas. Il insiste et se dit qu’il devra le vendre à moindre prix. Ce rêve lui parle de l’objet précieux, l’objet du désir, qu’il a pendant longtemps négligé mais qu’il prend très au sérieux, dorénavant.
Son chemin aura été celui de la dépendance à l’Autre, à l’assomption d’une indépendance, désirée et aussi bien, redoutée.
Dalila Arpin
Le 6 avril 2019