PODCAST « Se manifester comme analysant – l’After-effect » – AFTER 2

 Être interviewé sur les effets de sa psychanalyse… revient à se déclarer comme analysant. 

C’est un effet de l’analyse que de pouvoir « sortir de l’ombre » et se présenter devant une caméra, « exposer sa parole » à un micro et ainsi se manifester comme analysant. C’est une parole qui engage, qui participe d’une orientation, qui a valeur d’acte.

Écoutons les treize interviewés qui dans cette conversation ont échangé à partir de cette expérience partagée, et qui chacun à sa façon en explicite davantage l’intention. Intention en lien avec la dimension politique de cette prise de parole qui s’éclaire dans le fil de cet échange.

ÉCOUTER LE PODCAST :

« Se manifester comme analysant L’After-Effect »

Élisabeth Marion, Nathalie Lebreton, Anis Limami, José Alvès, Nicole Busquant Le Gouedec, Yves Aurégan, Emmanuelle Andre, Véronique, Isabelle Esnault, Guillaume Miant, Ludmila Volf, François Jubert, Caroline de Diesbach, Jean-Yves Marion.

Détails du podcast :

0.00 à 3.00 :  Introduction, Anis Limami, chercheur à l’INRAe, professeur à l’Université d’Angers – « Sortir de sa réserve », Élisabeth Marion, réalisatrice des vidéos – « Parier sur les effets », Guillaume Miant, psychologue en pédopsychiatrie.

3.00 à 11.20 : « Prendre ses responsabilités », Nicole Busquant Le Gouedec, enseignante – « Un acte qui engage », Véronique, cheffe de projet dans une grande entreprise – « Éthique et engagement », Ludmila Volf, artiste plasticienne et scénographe – « Être moins dupe » : Yves Aurégan, chercheur en acoustique.

11.20 à 18.30 : « Un coming out psychanalytique », François Jubert, médecin, psychiatre et psychanalyste – « Soulager grandement », Jean-Yves Marion, historien, ayant travaillé dans une grande entreprise – « Donner accès à la psychanalyse » : Emmanuelle Andre, psychologue clinicienne – « Un point de Capiton » : Anis Limami.

18.35 à 25.00 : « L’amour de savoir », Caroline de Diesbach, comédienne, metteuse en scène et autrice de théâtre – « Exposer sa parole » : Isabelle Esnault, infirmière en pédopsychiatrie – « Sortir de l’ombre » : Nathalie Lebreton, infirmière en psychiatrie – « Un effet de ré-animation » : Ludmila Volf – « L’œuvre au travail » : José Alvès, art-thérapeute – « Boomerang » : Isabelle Esnault – Conclusion « On y met du sien » : Anis Limami.

Argument :

Si l’on vient à la psychanalyse car on se cogne contre le réel, l’impossible, l’insupportable, l’analyse permet une élucidation – un gain de savoir – mais pas seulement.

Comme nous le rappelle Clotilde Leguil dans son livre « Céder n’est pas consentir », la psychanalyse vise à nous permettre de trouver ou retrouver l’accès à notre désir ; c’est cela l’éthique même de la psychanalyse : ne pas céder sur son désir, ainsi que le formule Lacan.1. Et par une orientation vers le réel comme le souligne Jacques-Alain Miller2, elle permet aussi que quelque chose change pour chacun dans son rapport à l’inconscient et à son mode de jouir. Un savoir-y-faire avec son symptôme peut en résulter, c’est-à-dire un « savoir se débrouiller avec. »3

Le pari de ces vidéos est de montrer, par le biais de la vie professionnelle, en quoi le singulier a une valeur incomparable. Les effets d’invention, que chacun des interviewés explicite, sont aussi essentiels dans le milieu du travail, donc dans le champ social.

Et, le rapport à la parole se modifie.

Ce point, beaucoup d’interviewés l’ont exploré, notamment dans ce Podcast où  la question de la prise de parole est centrale. 

Merci à AWITW pour la musique « Nobody’s know », dont il a gracieusement autorisé l’utilisation pour accompagner les podcasts tirés de la rencontre : AFTER. Cette musique est une création originale. AWITW avait déjà créé un morceau inédit pour la vidéo de François JubertEt sous ce lien, vous pourrez retrouver ses autres créations : AWITW

Lacan, Livre VII, L’éthique de la psychanalyse, p.368.

2Jacques-Alain Miller « Vers le réel », in UFORCA, Comment s’orienter dans la clinique ? Le Champ freudien éditeur, 2018.

PODCAST – Conversation sur les Souffrances au travail

Rencontre du 12 juin 2021 – Le cartel Petit Branchements sur la Psychanalyse avec Claudie Micouleau, Hélène de Swarte, Maela Michel-Spiesser, Noémie Guerpillon, Sarah Le Merour, invite René Fiori, psychanalyste, membre de l’Envers de Paris et président fondateur de Souffrances Au Travail -SAT et Élisabeth Marion, réalisatrice de vidéos sur les Effets de la psychanalyse dans la vie professionnelle.

ÉCOUTER :  LE 1er PODCAST    Le 2ème PODCAST     Le 3ème PODCAST

1è partie– Nouveaux managements – souffrances au travail 

0mn : Le management mortifère à l’œuvre/Le travailleur objet – 8mn35  : Les souffrances au travail –13mn50 : Évaluation/savoir suppose/savoir expose/savoir opposé – 16mn46 : « Céder sur son désir » au travail – 19mn08 : La reconnaissance / adresser son travail – 23mn44 à 33mn15 Travail du bricoleur /structure de langage.

2è partie l’érotique du travail versus symptôme au travail

0mn : Symptôme au travail : un rapport singulier au Réel / passages à l’actes – 4mn : L’accueil de la parole à Souffrances Au Travail – 10mn04 : Quand une psychanalyse débute sur un symptôme au travail / préserver l’intime – 16mn26 : S’adresser à quelqu’un qui entende – 19mn08 : Désordre du monde / la part du sujet / Renversement dialectique – 21mn44 à 26 mn : Angoisse / fixité / remise en mouvement / rebranchement.

3è partie – le Surmoi, la surobéissance au travail

0mn : Surobéissance / obéir au-delà du consentement / Ce que veut l’entreprise – 6mn10 : Ne pas consentir et s’exclure / isolement – 8mn50 : La part aveugle du consentement / forçage / trahison – 12mn49 : La pulsion de mort au delà du Nom–du-Père /un patient reçu à Souffrances Au travail17mn04 : Le Burn-out – 21mn24 à 24mn20 : Chute de la barrière de l’intime / « Il aimait Big Brother »/ Le travail et l’amour.

Références bibliographiques : Marie-Hélène Brousse, « L’érotique du travail », Revue La Cause du Désir, numéro 99. Clotilde Leguil, « Céder n’est pas consentir », PUF, Paris, 2021, voir l’article « Au-delà du consentement ». Claude Levi Strauss, « La pensée sauvage », Ed. agora. Souffrances au travail-Rencontre avec des Psychanalystes, ouvrage collectif, disponible sur le site de Souffrances Au Travail-SAT

Quelques vidéos ont servi de support au travail préparatoire du cartelRené Fiori« Les souffrances au travail ». Véronique, cheffe de projet dans une grande entreprise : « Ne pas céder sur son désir dans la grande entreprise ».  Yves, chercheur en acoustique : «  Mon vrai désir, faire de la recherche »Patrice, informaticien : « Mettre de la distance »Sophie, directrice et consultante en conseil et formation en ressources humaines « Ne plus craindre la surprise, bien au contraire ! »

PRÉSENTATION DE LA RENCONTRE par Maela Michel-Spiesser :

Les Petits Branchements sur la Psychanalyse sont organisés par l’ACF en VLB à Quimper. Ils visent à articuler un thème d’actualité à l’interprétation que peut en faire la psychanalyse comme marque du malaise dans la civilisation. Le 12 juin 2021, nous avons choisi de traiter des « SouffranceS au travail ».

Nos invités étaient sur-mesure : René Fiori pour son expérience à l’association Souffrances Au Travail et dont il est l’un des fondateurs, et Élisabeth Marion pour la réalisation de précieuses interviews pour son blog sur les effets de la psychanalyse dans la vie professionnelle.

Pour certains sujets, les formes de management issues de l’industrie et qui sont maintenant d’usage dans tous les champs – team building/lean management – ne permettent pas que le désir trouve à se loger. C’est une mise en pratique du discours capitaliste conceptualisé par Lacan comme ne faisant pas lien social : le sujet y est tu, du verbe taire, avec l’équivoque radicale du verbe tuer, comme certains passages à l’acte ont pu tragiquement le démontrer.

Pour d’autres, il s’agit de la rencontre dans le quotidien professionnel de quelque chose qui les regarde, de très près et qui provoque angoisse, passage à l’acte ou burn out. Il s’agira alors de pouvoir adresser à un analyste ce qui de cette effraction peut se dire pour en cerner les coordonnées inconscientes ou simplement rompre l’isolement radical du sujet en rétablissant une parole qui avait été évacuée.

Lors de ce Petit Branchement sur la Psychanalyse, nous explorons justement ce que le sujet peut être amené à rencontrer : un écho à la marque de son histoire, un père sévère, un enfant perdu… jusqu’à la rencontre forcée avec une jouissance obscure dont se repaît le Surmoi féroce, parfois habillé des oripeaux de l’idéal et qui pousse au pire sans consentement.

De nombreux analysants, qui ont accepté d’échanger avec Élisabeth Marion, mettent en lumière les trouvailles, inventions, fruits de l’analyse qui leur ont permis de trouver une nouvelle voie à leur désir. Les psychanalystes qui interviennent à Souffrances Au Travail ont également pu transmettre les effets de ces rencontres dans plusieurs ouvrages de référence.

PDF de ce texte

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Vincent MOREAU : « JE N’ARRIVE PLUS À TRAVAILLER »

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Vincent MOREAU est psychiatre et psychanalyste, membre de L’École la Cause freudienne et de l’Association Mondiale de Psychanalyse.

« Je n’arrive plus à travailler ». Ce sont les mots que cette femme de quarante ans prononce lors de ce premier entretien. Les signes de l’angoisse sont aussi très présents. Elle ne peut se lever le matin, avant d’aller au travail, sans ce poids, cette panique qui la fait immédiatement vomir. Les effets d’un réel impossible sous la forme du rejet atteignent aussi son corps. Elle doit se faire soigner pour une recto-colite hémorragique.

Elle a pris conscience que quelque chose se répète. En général, ses emplois ne durent pas plus de deux ans. Actuellement, elle est commerciale avec un fixe et une commission sur ses ventes. Elle y est depuis un an et repère que ce qu’elle appelle « ses cycles » recommencent. « J’ai une aversion pour ce travail » dit-elle. « Ils demandent toujours plus ; ce n’est jamais suffisant. Je le fais dans la panique et forcément, je déçois. Cela rend ma vie hasardeuse et incertaine. Comment puis-je supporter de décevoir alors que je veux être aimée ? », alors, elle s’en va. Elle sait déjà que, dans ces répétitions, la recherche de reconnaissance est sa principale motivation. Cela marche un moment jusqu’à ce qu’elle se rende compte que le désir de l’Autre n’est pas forcément au rendez-vous. En l’occurrence, dans sa vie de commerciale, l’autre n’est pas intéressé par elle mais par ses performances qui peuvent lui rapporter davantage.

Il y a quelque chose derrière et elle veut savoir.

Très vite, les premiers entretiens font apparaître le même schéma sur le plan affectif. Elle n’a vécu que quelques années avec le père de sa fille et s’est séparée. Toutes les autres relations qui ont suivi n’ont duré que quelques mois ou quelques années.

Dans son histoire familiale, sa mère n’a vécu qu’un an avec son père. Ce dernier la voyait de temps en temps. Sa mère a rencontré un autre homme dont elle a eu deux filles. Elle a le sentiment d’être exclue de de cette famille qui ne la contacte pas, ne l’invite pas à Noël ou aux fêtes familiales.

Il a fallu du temps pour arriver à un moment clé de l’analyse. Reparlant de celui qu’elle appelle son « père biologique », elle a cherché à le retrouver à un moment particulièrement difficile dans sa vie. Il lui a annoncé qu’il n’était pas son père avec une phrase terrible : « tu es le fruit d’une passe ». Se retournant vers sa mère, celle-ci lui a confirmé les faits et avoué qu’elle était issue de la relation avec un homme « de passage ».

De « passe » à « passage » le signifiant traumatique insu a fait son œuvre. Sa marque est visible dans les symptômes dont elle se plaint. Elle fait et défait, comme elle le dit, ses relations professionnelles et affectives pour n’être que de « passage » afin d’éviter le risque d’effondrement si le désir de l’Autre vient à lâcher. La marque du signifiant traumatique est aussi visible dans le corps avec les vomissements et le transit trop rapide.

Le travail analytique a été émaillé de ces moments d’effondrement qui ont nécessité, dans le transfert, une opposition ferme au lâchage, à « la lâcheté morale » dont parle Lacan dans « Télévision ». Il a fallu soutenir ses engagements de formation pour obtenir un diplôme qui lui donnerait un début de reconnaissance symbolique, de nomination aux yeux des autres. Elle a pu retrouver du travail et avoir un salaire qui peut lui donner son autonomie. Le travail n’est cependant pas terminé.

Il reste la question de se faire l’objet de l’autre pour avoir quelques miettes de reconnaissance. Cette question est à référer à la jouissance particulière de ses deux parents et à elle-même en tant que cause de leur désir afin de desserrer l’étau du symptôme qui se répète.

Vincent Moreau

le 27 septembre 2021

Vous pouvez retrouver Vincent Moreau dans une interview où il fait le lien entre ce que sa propre psychanalyse lui a permis de découvrir, ses effets pour lui-même et dans sa pratique auprès de ses patients : Vincent Moreau « Un engagement pour la vie ». 

Jean-Yves Marion « Dépasser ce qui me semblait interdit »

Après une longue carrière et de multiples métiers dans une grande entreprise, dans le secteur de l’énergie, Jean-Yves Marion est devenu historien.

Dans cet interview, il montre comment sa psychanalyse, pourtant brève, lui a permis de

« lever des interdits

(concernant) des choses que je ne me sentais pas en droit de pouvoir acquérir ou faire.» 

« Je pouvais m’autoriser à entreprendre quelque chose qui m’avait toujours fait rêver. »

Souffrances au travail – le samedi 12 juin 2021 – Visio-conversation

Un cartel de Brest-Quimper a animé le samedi 12 juin de 10H à 12H une visio-conversation « Souffrances au travail » dans le cadre de rencontres intitulées : « Petit Branchement sur la Psychanalyse ».

Vous pouvez écouter ici le PODCAST issu de cette rencontre.

Et voici le lien vers l’article qui y est consacré

Cartel PETITS BRANCHEMENTS. de g. à dr. : Sarah Le Mérour, Hélène de Swarte, Claudie Micouleau, Noémie Guerpillon et Maela Michel-Spiesser

Des extraits de quelques vidéos de ce Blog seront diffusés afin d’ancrer la conversation au plus près du point particulier abordé par chacun des interviewés concernant son lien au travail.

Burn out, harcèlement moral, absence de reconnaissance, isolement, humiliation…
Il n’y a pas la souffrance au travail mais des travailleurs qui souffrent.
Lors du prochain
Petit Branchement sur la Psychanalyse, nous converserons afin de cerner ce malaise dans la civilisation avec René Fiori, membre de l’Envers de Paris, fondateur de l’association « Souffrances au travail », dont l’interview en vidéo est sur ce Blog – ici – et Élisabeth Marion, membre de l’ACF, auteure du Blog « Les effets de la psychanalyse dans la vie professionnelle ».

Rencontre organisée par l’Association de la Cause freudienne en Val de Loire Bretagne.

Lien vers le site de l’ACF en VLB

René Fiori « Les souffrances au travail »

René Fiori, psychanalyste, membre de l’Envers de Paris, a fondé en l’an 2000, avec deux autres psychanalystes 

Souffrances au Travail – SAT 

Il retrace dans cet interview cette création et ce que son expérience à Souffrances au Travail lui a enseigné.

Les souffrances, les plus spectaculaires – comme à France Telecom – ou les plus discrètes, indiquent ce que représente le travail dans la vie d’un sujet.

René Fiori est le co-créateur de Radio-a. Il est l’auteur de : « Elfriede Hirschfeld – L’autre cas de Freud qui nous enseigne », éd Amazon, 2020, et de :. »Elfriede H, La Femme aux épingles : De la névrose obsessionnelle à la mélancolie », éd. Amazon, 2015.

Cette vidéo est sous-titrée en français et en espagnol. La transcription et la traduction ont été faites par René Fiori, relues par Brigitte Brossais.  

Este video tiene subtítulos en francés y en español.

Lettre de Anne GANIVET-POUMELLEC

STARTUPER, NOUVEL ORDRE MONDIAL ?

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Anne GANIVET-POUMELLEC est psychanalyste, Membre de l’École de la Cause freudienne, de l’Association Mondiale de Psychanalyse, responsable de l’institution Souffrances au travail-SAT, et membre de la FIPA : Fédération des Institution de Psychanalyse Appliquée.

Dans un entretien pour la revue Multitudes, Jacques-Alain Miller désigne le déchaînement contemporain, auquel nul n’échappe, sous le nom de ‘tsunami numérique’1.

Si nous pouvons aisément vérifier que l’ordre numérique, ainsi qualifié, secourt le capitalisme, il est plus délicat de saisir comment l’être-parlant ballotté par ce flux impétueux s’en réchappe ou y résiste, tout en s’y faisant. Deux analysants très décidés, promoteurs de start-up, ont pu éclairer cette question.

La start-up, élément nouveau dans le monde de l’entreprise, se nourrit imaginairement des astres de la Silicon Valley. Partir d’une recherche-bricolage dans un garage et terminer au firmament des valeurs boursières est un trajet qui recèle des bouffées d’ambition.

La start-up est un instrument hybride entre réalisme et utopie. D’une part, affine aux marchés financiers, elle va aller chercher une capitalisation auprès des fonds d’investissements parce qu’elle représente un pari de profit prometteur avant d’être une marchandise échangeable. En ce sens elle est le capitalisme financier comme tel. D’autre part la start-up est aussi, souvent, utopie ou en tout cas novation entre calcul et intuition.

La start-up est donc une jeune entreprise innovante à fort potentiel de développement, nécessitant un investissement important pour pouvoir financer sa croissance rapide.

L’entrepreneur de start-up est un être à part, en tant que jeune pousse, il expérimente un début dans la vie sans la moindre autonomie et passe son temps, avec d’autres comme lui, dans une ‘pépinière’, une ‘couveuse’, un ‘incubateur’ ou autre ‘accélérateur’, ces termes employés couramment dénotent une mise en culture dont on attend une récolte prometteuse, il est aussi reconnu comme celui qui prétend obtenir des moyens de paiement, il s’apercevra vite que tout son temps, son énergie seront employés à faire le beau auprès des organismes qui vont lui fournir de quoi exister comme entrepreneur.

Beaucoup de ces jeunes entrepreneurs en devenir jettent l’éponge, d’autres continuent et percent, d’autres encore vont être rachetés et amalgamés à une entreprise déjà-là ou une entreprise en devenir plus choyée par les fonds d’investissement, voire promue par les fonds à partir des expériences de création dont ils auront eu à connaître les fondamentaux.

Être startuper, c’est aussi « tout un art », dans le sens de l’artifice, il faut être capable de produire un « faire semblant » et le vendre, « fake it until you make it ». Persuader l’investisseur que preuve est faite d’une promesse. L’agilité est le trait de caractère du startuper, pouvoir pivoter, s’adapter, parfois jusqu’au point où le sentiment de perdre pied et de plonger dans la vague sans pouvoir respirer s’empare de l’être parlant.

Chacun de ces deux analysants avait connu la situation de salarié et s’y était senti à l’étroit.

Être startuper était donc une décision, pour autant rien ne prépare au quotidien d’un entrepreneur de start-up. Tony et John ont pris la décision – pour soutenir un désir qui, pour être à l’origine de leur aventure, est ensuite secoué et mis à mal – de venir en parler à un psychanalyste. John a noué sa demande d’analyse à la création de sa start-up. Tony était déjà en analyse quand ce changement professionnel s’est imposé à lui. Si pour John, l’objet s’est différencié, complexifié, ramifié et son désir s’en est trouvé raffermi, pour Tony, c’est au prix de s’en détacher que son désir a trouvé sa pente.

Créateur de start-up n’est pas le nom d’un symptôme contemporain mais se faire le nouvel homme du discours du capitalisme n’est pas sans risque. « Ce qui distingue le discours du capitalisme est ceci – la Verwerfung, le rejet en dehors de tous les champs du symbolique […] de la castration. Tout ordre, tout discours qui s’apparente du capitalisme laisse de côté ce que nous appellerons simplement les choses de l’amour »2.

Veiller à ce que les choses de l’amour – par le lien vérifié du partenaire-symptôme et la mise en jeu du semblant d’objet a qu’est l’analyste – ne soient pas laissées de côté est d’une bonne inspiration ; c’est un pari que Tony et John ont fait mais pour chacun la bifurcation est singulière.

Pour John, la création de l’entreprise est l’occasion d’une véritable fondation, d’un pacte de jouissance qui se concentre et se resserre. Pour Tony, il s’agit plutôt de desserrer, prendre une distance avec ce partenaire-symptôme qui fait le maître et du même mouvement, retrouver une agilité où les partenaires se pluralisent, ne plus être le promoteur. Tous deux continuent leur analyse3.

le 28 octobre 2020

1. Entretien avec Gilles Chatenay, Éric Laurent, Jacques-Alain Miller Le calcul du meilleur : alerte au tsunami numérique – Multitudes 2005/2 (n°21) p. 195-209.

2. Lacan J., « Je parle aux murs », Je parle aux murs, Paris, Seuil, 2011, p. 96.

3. Cet article a fait l’objet d’une parution plus détaillée dans la revue La Cause du désir n° 105. p. 73 – 78.

Véronique « Ne pas céder sur son désir… dans la grande entreprise »

Véronique est cheffe de projet dans une grande entreprise.

Dans cet interview, elle retrace son expérience du monde de l’entreprise où ainsi que l’écrit Marie-Hélène Brousse :« le capitalisme a fait du travailleur un objet du marché comme les autres objets, un gadget facilement obsolète. »( la Cause du Désir N° 99 « Travaille »)

Véronique met en valeur comment la psychanalyse lui a permis, non seulement de survivre dans ce monde impitoyable, mais aussi de ne pas céder sur son désir… et puisque le désir s’en mêle, de prendre la parole.

Anne Ganivet-Poumellec, membre de l’Ecole de la Cause freudienne et déléguée à la FIPA – Fédération des Institutions de Psychanalyse Appliquée – pour  Souffrance au Travail et René Fiori, membre de l’Envers-de-Paris, membre fondateur et président de Souffrances au travail, ont choisi cette vidéo pour le nouveau site de SOUFFRANCE AU TRAVAIL- SAT. 

Voici un texte écrit par Véronique :

SALARIÉ OBJET (D)ÉVALUÉ, ou quand le désir s’en mêle : prendre la parole !

« Travaillant dans une entreprise multinationale depuis de nombreuses années, j’ai vécu de l’intérieur les dégâts liés à l’évaluation et aux nouvelles méthodes de management…  LIRE LA SUITE

Lettre de Nathalie MORINIÈRE

Nathalie Morinière

EXPERTE

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Nathalie MORINIÈRE est membre de l’École de la Cause freudienne et de l’Association Mondiale de Psychanalyse

Divorcée depuis un an, Annie demande à rencontrer un psychanalyste pour tenter de traiter l’angoisse qui l’envahit et l’empêche d’assumer sa fonction de directrice d’une grande entreprise, ce qui est tout nouveau pour elle. Annie se présente comme une battante. En plein divorce, elle souhaite prendre sa revanche sur la vie, et rebondir suite au laisser-tomber de son mari. Elle veut prouver à tout le monde qu’elle est « une femme capable d’être à la hauteur de ses propres ambitions, et tel un homme d’occuper un poste de chef d’entreprise », dit-elle. Récemment recrutée par un grand groupe financier, Annie ne compte pas ses heures de travail. Son investissement professionnel lui permet « d’oublier son chagrin » et de tromper l’ennui à l’idée de se retrouver seule le soir, dans son studio. Mais c’est sans compter l’anéantissement qui la guette. Coincée dans cette spirale de devoir travailler toujours plus, et prise dans ce qui la déborde, Annie ne parvient pas à renoncer à cette position de jouissance morbide. Elle décide de se faire aider par un coach pour tenter de faire face aux impératifs financiers attendus. Mais rien n’y fait. Annie est abattue et se désespère en pensant à l’avenir. Âgée de 48 ans, elle craint de « finir comme sa mère et d’être conduite au suicide ».

L’analyse va lui permettre de nommer l’absurdité de son épuisement et l’autoriser à prendre les décisions qui lui conviennent.

Au cours d’une séance, elle dit : « je suis un espert dans le domaine ». Ce signifiant « es-pert » que je fais résonner, va inaugurer une temporalité nouvelle dans le travail de la cure. En un éclair, Annie mesure la portée de cette équivoque homophonique qui vient toucher cette part de jouissance indicible. « Es-pert » et non pas « experte », ce lapsus évocateur est propice au déchiffrage du symptôme. Annie m’explique avoir toujours souhaiter répondre au vœu de son père qui désirait avoir un fils afin qu’il puisse reprendre la relève de la ferme. Elle « s’est battue toute sa vie pour obtenir sa reconnaissance » dit-elle avec amertume. Elle garde en elle la marque de son manque d’amour et l’absence de reconnaissance de sa part, malgré tous les efforts déployés pour se faire aimer de lui. Il lui fallait ressembler à un homme pour tenter d’obtenir le regard de son père qu’elle admirait plus que tout.

Suite à cette élaboration, un rêve se produit et lui permet de dénouer ce qui, dans son inconscient, avait été refusé. Dans la scène onirique qu’elle énonce, son père est en larmes et elle ne sait que faire pour le consoler. Avec l’analyse du rêve, elle épingle le signifiant « larmes » qu’elle fait résonner : « larmes » devient « l’arme », objet phallique par excellence auquel elle-même, s’est identifiée. Par cette équivoque, elle réalise la position d’identification masculine qu’elle occupe et qui lui permet de faire exister par la voie du symptôme, le phallus imaginaire.

Ce moment-clé dans l’analyse l’autorise à accueillir sa position de femme. Dès lors, Annie ne sera plus déterminée par cet impératif surmoïque à « faire l’homme » et saura trouver les moyens nécessaires pour changer de travail et occuper un poste qui correspond à un nouveau désir : « celui de prendre soin d’elle tout en mettant en œuvre sa réelle expertise ».

Le 08 juin 2019

Sophie ‘Ne plus craindre la surprise, bien au contraire !’

Sophie est directrice associée et consultante en conseil et formation en ressources humaines

auprès des personnels de direction, encadrants et personnels de terrain, dans les secteurs de l’entreprise, associatif et public.

Dans cet interview, elle donne des exemples concrets de ce qu’a changé sa psychanalyse à son approche professionnelle.  « Avant de poser des limites à l’autre, ce que permet l’analyse, c’est de ne plus être dans le débordement de soi-même (…) et (de ce fait) d’être plus disponible à l’autre. »

« La psychanalyse, ça permet de prendre du recul dans une situation en live ! et de ne plus subir, de ne plus être pris par pleins de questions, d’angoisses… »

Sophie était invitée par René Fiori et l’Association des Psychologues Freudiens à Paris le 26 mai 2018Son intervention a été publiée dans le quatrième opuscule édité par l’Association des psychologues freudiens : « Quelle place pour la parole dans la clinique d’aujourd’hui? »  sous le titre : « Comment tu vas lui dire tout ça ? »

Photo-montage – Interview de Sophie

Cette vidéo a été tournée en décembre 2017 à Angers chez Nathalie Morinière qui soutient depuis le début ce projet d’interviews sur « l’effet de la psychanalyse… dans la vie professionnelle ». 

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